Arrêtons de parler de La La Land

Publié le 19 février 2017 Mis à jour le 29 octobre 2017

Oui je sais, c’est paradoxal dans un article intitulé “arrêtons de parler de La La Land” de parler justement dudit film. Mais il est temps de crever l’abcès : La La Land n’est pas le film de l’année ! Oui braves gens, vous avez été dupés, manipulés, aveuglés par le strass et les paillettes d’Hollywood. Ce film est une pâle copie de différentes comédies musicales, une “romance à la parisienne” (à prononcer avec l’accent anglais pour plus de charme), rempli de citations et références à d’autres films.

Ce film est vendu comme un film musical, et effectivement ça commence plutôt bien avec une séquence d’ouverture efficace, de même que le numéro avec les colocataires de Mia (Emma Stone), mais très vite ça se dégrade. Ryan Gosling et Emma Stone chantonnent à peine les malheureux airs qui leurs sont donnés. Les voix ne sont pas timbrées, aucune explosion vocale, l’émotion passe à peine et les mélodies sont quelconques. C’est dommage, les deux acteurs sont plutôt de bons chanteurs, Emma Stone le prouve d’ailleurs dans sa chanson The Fool Who Dreams (qui sera la seule chanson réellement chantée du film). Or c’est une comédie musicale, le spectateur devrait avoir les thèmes en tête pendant au moins une semaine et mourir d’envie de monter sur une scène pour s’égosiller en sortant de la salle de cinéma ! Pour être honnête il y a deux thèmes sympas qui sont malheureusement martelés tout au long du film… peut-être un panne d’inspiration du compositeur… De plus, le mixage est raté, la musique couvre les voix et peu de morceaux ont une réelle intensité.

Cependant, rendons à César ce qui est à César : le travail des couleurs, le cadrage, les paysages sont beaux. Le directeur de la photographie, Linus Sandgren, a fait du très bon travail, les plans s’inspirent beaucoup des tableaux d’Edward Hopper, et beaucoup de scènes sont des références aux comédies musicales des années 40, mais aussi à Gone With the Wind (Autant en Emporte le Vent, Victor Flemming, 1939, qui n’est pas une comédie musicale), et aux films musicaux du français Jacques Demy. Alors oui c’est beau, mais il y en a partout ! L’interêt de la citation au cinéma, c’est d’apporter quelque chose à la narration, d’enjoliver certains plans, mais ça doit rester discret. Ici le réalisateur nous hurle au visage “Hey ! Regardez j’ai vu ces films et je fais comme eux ! Aimez-moi !”, les citations perdent de leur subtilité, et surtout n’apportent pas grand chose à l’histoire.

Enfin, le scénario est creux, Dieu qu’il est vide ! On connaît la fin au bout des dix premières minutes, le film tente de se montrer vaguement poétique, mais comme il ne le fait qu’à moitié... ça tombe à l’eau : soit on va à fond dans l’onirique avec une vraie dissociation entre la réalité et le rêve sous forme de numéro musical, comme le fait Chicago (Rob Marshall, 2002), soit on ne le fait pas, mais dans le cas de La La Land on se retrouve dans un entredeux bâtard qui peut être déroutant. Ce qui m’agace le plus c’est que ce film est une copie malheureuse de New York New York, réalisé par Martin Scorsese en 1977 avec Liza Minelli et Robert De Niro (si vous ne l’avez pas vu, courrez le voir, c’est de la bonne). Le musicien de jazz qui cherche à créer son club, la jeune artiste qui rêve de célébrité, la romance entre les deux et leur séparation, tous ces éléments sont les mêmes dans La La Land et New York New York, sauf que dans le cas du second, nous sommes face à une vraie comédie musicale. De plus le jeu de Ryan Gosling et Emma Stone est terne, ce qui est étrange quand on connait le talent des deux acteurs.

Maintenant je dois vous avouer quelque chose dans un plot twist digne des plus grands films de Night Shyamalan : j’ai aimé La La Land (*insérez ici une musique dramatique*), c’est un mauvais film, mais un bon divertissement. Oui il m’a laissé un goût amer dans la bouche, parce qu’il avait du potentiel, potentiel gâché. ça n’en fait pas pour autant un film à jeter en disgrâce, mais il ne mérite certainement pas toute l’attention qu’il reçoit, ni ses 14 nominations aux Oscars, sauf peut-être pour la photographie, et encore. Mon avis personnel est que c’est un film qui est arrivé au bon moment, il est sorti à une période où les gens avaient besoin de cette petite romance sans prise de tête, vaguement poétique et musicale, parce que oui La La Land donne le sourire, ce qui explique sont succès. Je pense maintenant qu’il faut remettre les choses à leur place et prendre ce film pour ce qu’il est : un film agréable, que l’on peut regarder pour se remonter le moral (avec un pot de glace à la vanille et un verre de Chardonnay comme toute bonne américaine en post-rupture), mais certainement pas le chef-d’oeuvre que l’on en fait. Je n’encourage pas à détester le film, ni même à cracher dessus, je propose juste une chose : arrêtons de parler de La La Land.

Rédacteur : Louis Pottier-Arniaud

Mis à jour le 29 octobre 2017